Premier volume de l’Atlas des Sept Cités, Bejofa, la cité des voleurs, un supplément pour Nighprowler 2 consacré à la description d’une cité indépendante proche de Samarande vient de sortir aux éditions 2d sans faces.
Voir Bejofa et mourir.
« Chaque homme, poète ou non, se choisit une ou deux villes, patries idéales qu’il fait habiter par ses rêves, dont il se figure les palais, les rues, les maisons, les aspects, d’après une architecture intérieure, à peu près comme Pinarèse se plaît à bâtir avec sa pointe d’aquafortiste, des constructions chimériques, mais douées d’une réalité puissante et mystérieuse. Qui jette les fondations de cette ville intuitive ? Il serait difficile de le dire. Les récits, les gravures, la vue d’une carte de géographie, quelquefois l’euphonie ou la singularité du nom, un conte lu quand on était tout jeune, la moindre particularité : tout y contribue, tout y apporte sa pierre. »
Théophile Gautier, Venise, Les Editions de l’Amateur
Ce qu’écrivait Théophile Gautier tandis qu’il approchait de la Cité des Doges* qu’il allait découvrir pour la première fois doit bien pouvoir s’appliquer aussi aux villes imaginaires, et partant aux villes créées par et pour le JdR. Parmi celles-ci (pour n’évoquer que les créations françaises) certaines ont fait date, voir école, comme Pole pour Bloodlust ou Samarande pour Nightprowler 1. Mais leur prototype reste Laelith, la cité créée en 1986 par l’équipe de Casus Belli. On en retrouve des réminiscences dans toutes les créations qui ont suivi, parfois de façon presque subliminale, presque un hommage, comme ce jeu de mots de la page 58 du supplément qui nous occupe (« Un prévôt mieux que deux Tulloras ») qui se trouvait déjà sous forme de crapoux dans le Laelith de 86 sous une forme très proche (de mémoire : « un Laelithien vaut mieux que deux Tulloras. Surtout que deux Tulloras d’égout »).
Bejofa, Bejofa, tes bons petits toits tout chauds…
Au-delà de ces considérations sur l’attachement particulier qu’on porte à telle ou telle cité et sur les filiations dans le petit monde du JdR, que dire de ce premier opus de l’Atlas des Sept Cités ? 96 pages en N&B, très denses très correctement illustrées (on est en net progrès de ce point de vue par rapport au livre de base) et agréablement mises en page, sous couverture souple en couleur qui nous présente dans un camaïeu de tons ocres une embuscade lâchement tendue à la prévôté. Au passage, il est bien dommage de ne pas avoir exploité le verso des rabats de la couverture qui permettent d’y glisser la carte qui accompagne le livre et dont nous parlerons juste après. Ceci dit il est probable que cela n’aurait fait que tirer le prix de l’ensemble à la hausse, et de ce point de vue on est déjà plus que limite. J’entends d’ici les mauvaises langues (non Suisses de leur état) s’écrier : 32 euros les 96 pages en N&B, à ce prix là ça ne s’appelle pas la Cité des Voleurs pour rien !
Quelqu’un a un plan ?
En plus d’un historique de la ville, de considérations sur ses institutions, son économie et ses us et coutumes ainsi que des développements sur la vie au travail et les loisirs de ses habitants vous trouverez dans ces pages une description de ses nombreuses prévôtés et encore plus nombreux quartiers. Vous pourrez aussi vous inspirer pour imaginer les bâtiments dans lesquels vos joueurs auront à pénétrer plus ou moins furtivement de ceux qui sont décrits et illustrer dans la partie réservée aux bâtiments et plans, et s’ils sont perdus vous pourrez déplier sur la table entre les tasses de café froid, le paquet de curly et leurs yeux ébahis la magnifique carte format A1 où, pour ainsi dire, on distingue chaque maison, et qui a demandé à son dessinateur beaucoup de persévérance.
Il faut noter que l’ouvrage contient aussi deux scénarios dont je ne peux encore rien dire car je ne les ai pas lus mais c’est toujours bon à prendre pour se mettre dans l’ambiance.
Bejo Messieurs Dames, je ne suis pas un voleur…
Pour conclure je voudrais dire que même si livre de base de Nightprowler 2 et les mécanismes de la nouvelle version sont globalement moins bien réussi que ceux de la première version, l’écran et ce premier atlas sont d’excellente qualité, ils comptent au rang de ces suppléments qui se lisent d’une traite et avec un réel plaisir (ce qui n’est pas si courant). Si on ajoute à cela que les suppléments sur les villes peuvent être achetés même si on n’a pas le jeu de base, juste pour le plaisir ou pour se documenter, il ne vous reste plus qu’à courir le voler. Euh, enfin, vous le procurer.